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Extrait "Le Monde d'Ourasi"

"...

A l'entraînement Raoul le menait assez durement, connaissant parfaitement ses instincts de rebellion face au devoir d'obéissance. Ourasi filait dans la lumière du soleil, rattrapant les rayons dorés, fendant l'air pur, emportant son driver à la vitesse du vent dans des allures d'une souplesse extraordinaire.

En rentrant aux écuries, après la douche et le couteau de chaleur que Raoul passait de bas en haut, puis de haut en bas, pour assécher son poil, Ourasi rentrait dans son box avec l'allure d'un pharaon observant ses serviteurs. Pourtant il se roulait dans la paille avec l'inélégance de tout cheval s'asséchant ainsi.

En course, c'était encore un tout autre cheval, il devenait un destrier de feu. Susceptible et dominant, il n'acceptait aucun concurrent à ses côtés. C'était un athlète superbe, réglant sa vitesse à la volonté de son driver et dans son étrange regard, on retrouvait l'impertinence de son enfance.

...

Pour le premier Prix d'Amérique qu'Ourasi courut et gagna, le ciel était d'un bleu froid, immobile, un bleu d'hiver. Une fine couche de neige verglacée festonnait la piste de Vincennes. Dans les gradins, la foule était attentive. Les loges abritaient des personnalités dont le Président de la République. Le parfum des femmes flottait comme de longues écharpes argentées.

Le signal du départ fut donné et les chevaux s'élancèrent d'une façon singulièrement prudente, chacun observant l'autre. Peu à peu la cadence prit un train plus vif. Les casaques mélangeaient les couleurs d'un arc-en-ciel glissant sur la piste, un long serpent de couleurs, de fêtes et de batailles.

Face aux tribunes dans la plaine où le vent fouettait le visage des hommes et des chevaux, la vitesse devint vertigineuse, semblant incontrôlable, un meurtre. Ourasi enclencha son jeu de jambes de guerrier. Il devança lentement les autres, quittant le peloton avec la force d'un dieu.

Dans les tribunes, les hurlements montaient comme une marée, folle, ivre.

Jean-René Gougeon, les dents serrées, le dos replié sur les genoux, ressemblait à un acrobate, un funambule, il poussait cet étrange cheval aux extrémités de sa force, et comme enragé, Ourasi augmentait encore sa vitesse brutale, irrésistible, imbattable.

                           Extrait Le Monde d'Ourasi par Serge Dupont-Valin et Anna.



10/11/2009
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